Extraction

Réussir son café à la Chemex

Préparer son café à la Chemex peut sembler un acte anodin, répétitif voire simple ; mais il existe pourtant une belle liste de variables qui peut faire que, d’un jour sur l’autre, le résultat en tasse soit différent. Ces variables sont appelées les « paramètres de préparation », et elles sont au nombre de trois :

  • Le temps (dégazage + total)
  • La température
  • La quantité de café

Il va sans dire qu’il y a, dans le fond, beaucoup plus de paramètres : l’eau utilisée, la taille de la mouture, la propreté de la Chemex, le coup de main,…
Ah, et n’oublions pas le principal : le café utilisé. Car oui, tout ce que je vais vous dire dans cet article n’est pas systématique. Vous devrez adapter votre recette selon le café (si vous le changez, ce qui est fort probable), re-tester la recette, équilibrer les grammes et les secondes,… C’est un manège incessant, mais c’est ce qui fait la beauté du slow coffee. Tout dépendra également des goûts de chacun, car le résultat ne sera pas apprécié de la même manière selon la personne qui boit le café avec vous (c’est par ailleurs une excellente manière de vous tester, j’en fais l’expérience quotidiennement).

S’il est donc difficile de définir une équation température/temps/quantité qui sera systématique, on peut néanmoins définir une base efficace.

En avant, donc, pour ma recette de Chemex.

Etape préliminiare : les accessoires

On ne prépare pas une Chemex à la louche, ni à la va-vite. On prend son temps pendant cette mini cérémonie du café.
Il faut donc :

  • Une Chemex. J’en ai une pour 8 tasses, achetée ici. Il existe des petits modèles (3 tasses notamment) mais faites attention, par « tasse » on entend « cup » et non pas « mug ». Si vous êtes un gros buveur de café, ou plus simplement, si vous êtes plusieurs, ne prenez pas le risque de ne pas avoir assez de contenance pour servir correctement tout le monde.
  • Un filtre à Chemex, qui est plus épais que les filtres « classiques ». J’utilise les filtres naturels (il en existe des blancs, dits « lavés »), que je rince abondamment.
  • Une bouilloire. Vous verrez souvent, notamment sur les vidéos explicatives, des bouilloires en col de cygne. Ces dernières ont l’avantage de verser l’eau avec parcimonie et précision, ce qui peut se révéler utile avec une Chemex. L’inconvénient principal est le prix, car ces bouilloires sont généralement de meilleure facture. Il en existe des électriques (assez chères) ou « classiques » (qui se chauffent sur une plaque), mais pour lesquelles il faudra ajouter un thermomètre plongeur. Sinon, votre bouilloire fera aussi l’affaire, tout est question de doigté, comme nous le verrons.
  • Une balance. Indispensable. J’ai pour ma part l’excellente balance Hario (voir ici) qui a l’avantage d’être très précise (à 0.1g près) et d’avoir un chronomètre intégré. Ces deux spécificités vont nous être très utiles pour la préparation.
Préparation recette café Chemex

Une Chemex, son filtre naturel, une balance Hario et quelques grains de café. Photo : Café Mag

Etape 1 : préparer le café et l’eau

Pour ma recette, j’utiliserai 500ml d’eau pour 30g de café. Pas un gramme ou un ml de plus (même si la différence peut paraître vraiment minuscule). Grâce à ce dosage, j’aurai deux tasses bien remplies et savoureuses.
Ces 30 grammes de café, je les mouds quelques minutes avant de préparer ma Chemex, avec une mouture que je qualifierais de « moyennement grossière ». Du plus fin au plus grossier, je placerais vers les 70-80%. Rappelez-vous : trop grossier, et l’écoulement se fera trop rapidement. Trop fin, et vos 500ml d’eau n’auront pas le temps de tous passer, avec qui plus est une puissance en tasse beaucoup trop importante.

Pour l’eau, il s’agit d’arriver précisément à 93°. Là encore, pas un de plus ni de moins. C’est cette précision qui amènera une vraie qualité à votre tasse. Comme je le disais plus haut, une bouilloire électrique avec thermomètre intégré est le must. Faites également bien attention : les degrés baissent vite. Jetez toujours un œil sur la température de votre bouilloire, et si jamais vous êtes dérangé pendant votre préparation, remettez un petit coup de chauffe si nécessaire.

Etape 2 : rinçage et préchauffage de la Chemex

Une fois le filtre placé dans la Chemex (soit en classique, les 3 feuilles côté verseur, soit en origami), on le rince abondamment, dans sa presque totalité (les parties qui ressortent de la Chemex ne sont pas importantes) avec l’eau chaude. Ce qui va avoir une double fonction : nettoyer et enlever l’odeur de papier (dans le cas de filtres naturels) et surtout préchauffer votre contenant. Faites tournoyer l’eau dans votre Chemex pour que les parois chauffent uniformément, et jetez l’eau en soulevant le filtre pour ne pas re-imprégner ce dernier avec l’eau censée le nettoyer (ce serait bête de faire marche arrière).

Etape 3 : dégazage

C’est le moment ! Je verse les 30g de café moulu dans le filtre, je tare la balance et, toujours en vérifiant que l’eau est à 93°, je mouille la mouture de 60ml d’eau (le ratio de 1 pour 2 est facile à retenir), ce qui permet de recouvrir tout le café et de le saturer. Je remue un peu avec une petite spatule pour imprégner tout le café (pensez toujours « uniformité ») et je laisse reposer pendant 30 secondes. Attention, il est important (et également pour la prochaine étape) de verser dé-li-ca-te-ment votre eau, si vous la versez trop vite, trop sur le côté ou trop au centre, la mouture ne sera pas mouillée uniformément et surtout, l’eau passera à travers le café sans être suffisamment chargée en arômes. On conseille donc de verser en spirale, en partant du milieu vers l’extérieur.

Un peu de science : ce moment, que l’on appelle donc dégazage (aussi associé aux mots « bloom » et « degassing » en anglais) ne doit pas être pris à la légère. Techniquement parlant, le dégazage représente l’étape ultime où les gaz de dioxyde de carbone (entre autres) s’évaporent (d’où la réaction, qu’à titre personnel je trouve fascinante, de bulles qui gonflent et éclatent). D’ailleurs, depuis la torréfaction, les gaz s’évaporent peu à peu pendant environ deux semaines. Cette évaporation s’accélère considérablement quand le café est moulu et donc, une troisième fois, lors du dégazage de votre préparation Chemex. Vous l’aurez compris, durant ce dégazage, si votre café « gonfle » et « fait des bulles », c’est parallèlement un bon signe de fraîcheur.
Mais pourquoi en veut-on tellement à ce pauvre dioxyde de carbone ? Simplement car ce dernier amène de l’amertume et surtout empêche l’eau d’imprégner complétement le café, comme une « couche protectrice ». Le résultat n’est donc pas optimal.

Etape 4 : l’infusion

C’est l’étape où je verse le reste de l’eau. On résume : on a pour l’instant versé 60ml d’eau en 30 secondes. Il nous reste donc 440ml d’eau en 3 minutes.
Ces 440ml, je vais les verser en deux étapes

  • 240ml, que je vais laisser descendre tranquillement 1 minute (donc 1 minute après la fin de mon dégazage)
  • 200ml, qui couleront jusqu’à 4 minutes
Le café coule dans la Chemex

L’extraction lente en Chemex. Photo : Café Mag

Résumons donc :

0 > 30 secondes : 60ml
30 secondes à 1 minute 30 > 240ml
1 minute 30 > 3 minutes 30 > 200ml

Etape 5 : l’aération

Une fois les 3 minutes 30 atteintes, je retire le filtre et surtout, je n’oublie pas une dernière étape (beaucoup de tutoriaux l’omettent, et c’est fort dommage) : faire tournoyer le café sur lui-même en faisant quelques mouvements circulaires de poignet, ce qui va avoir pour effet de mélanger les strates (en 3 minutes 30, elles ont effectivement le temps de se former) donc d’uniformiser le liquide ainsi que la température et enfin d’aérer une dernière fois le café pour booster les arômes.

Le café est servi !

A vous de tester et d’inventer votre propre recette. N’oubliez surtout qu’une différence, même minime, dans un des paramètres, et votre résultat changera ! Je vous invite enfin à consulter le livre « Le café, c’est pas sorcier » qui aborde aussi la thématique.